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COMMENT MATHER LES CHEVAUX ? Exemples !

ET SI VOUS À ASSISTIEZ À MES COURS, EN PASSAGER CLANDESTIN… ?

1. D’une douloureuse primitive au plaisir intégral !

Dimanche, début d’après-midi. Je commence ma journée de travail le cœur léger. Ce matin, seule grasse mat en amoureux de la semaine, pas de visite aux chevaux, une belle balade au bord de la mer main dans la main, suivie par la cueillette des tomates, fraises et framboises du jardin, qui poussent depuis des mois dans nos bacs en bois artisanaux, et enfin un agréable repas, mijoté avec tendresse, en tête-à-tête.

Je sonne, on m’ouvre. Xylam m’accueille avec du soleil dans les yeux. Je sens de l’impatience dans son sourire. Sa mère me fait la bise à son tour, tout aussi ravie de mon arrivée.

« Bonjour Lisa, comment vas-tu ? Veux-tu un thé ?

– Avec plaisir, on ne change pas les bonnes habitudes !

– Menthe, agrumes, fruits rouges, citron, caramel, vanille…?

– Au citron, ce sera parfait, merci beaucoup. »

Pendant que la maman s’affaire en cuisine, je pose mes affaires sur la table de la salle à manger et déclame mon célèbre : 

« Quoi de neuf ? à Xylam. 

– On a fait un nouveau truc en math, j’ai rien compris ! 

– De quel chapitre s’agit-il ?

– Les intégrales, un bidule comme ça… Le prof a fait son cours au tableau, tout content, mais tout seul ! Il nous a perdus.

– Ok, voyons-ça. Avez-vous vu les primitives et les calculs d’aires ?

– Ben… J’sais pas trop, y avait des machins comme des dérivées, puis des S bizarres et, oui, des aires. Mais sérieux, j’ai pas réussi à suivre.

– Le prof vous a fait tout ça en une semaine !

– Oui, il dit qu’on est en retard par rapport aux autres classes et qu’il doit avoir fini ce chapitre pour le bac blanc. Mais là, si on tombe sur les intégrales au bac blanc, ça va être la cata…

– Mais non, ne t’inquiète pas, on a encore un peu de temps. C’est un chapitre difficile, mais tu vas piger. Tu n’es pas plus con que les autres TS ! Il faut juste bien décortiquer les étapes. Rien que les primitives, il aurait dû y passer une, voire deux semaines. C’est comme le début des dérivées. Il y a plein de formules différentes. Il faut les utiliser plusieurs fois et petit à petit ça va rentrer tout seul. Avez-vous vu les cas où il faut ajouter une constante devant, afin de tomber exactement sur la formule du tableau ?

– Franchement, je sais pas, les primitives, c’est trop dur ! Des fois faut dériver, des fois non, j’ai rien compris. Mais en plus, on a contrôle sur les complexes avant les vacances ! Et on a fait un truc en SVT, plus dur que la génétique je trouve : l’immuno. Faut que tu viennes deux heures dans la semaine et deux heures dimanche prochain !!! »

Sa mère arrive avec un petit plateau, très mignon, une tasse de thé fumant et quelques chocolats. Le service est digne d’un salon de thé cinq étoiles ! Qu’ai-je fait pour mériter d’être gâtée comme cela ? Je me le demande, mais pas trop longtemps quand même. Il faut profiter des cadeaux de la vie quand ils se présentent.

« Bon, les complexes, c’est lundi en huit, donc on voit ça une heure dans la semaine. Et on fera de l’immuno la deuxième heure. Et dimanche prochain, on refait une heure de chaque. Comme ça, entre les cours, tu auras le temps de bosser toute seule. Dimanche, on fait le point. Dak ?

– Yes ! Bon, ça devrait aller… Tu crois que je vais y arriver? Ils avancent putain de vite ces profs, ils croient qu’ils sont tout seuls ou quoi ? Ils savent pas qu’on n’a pas que leur matière à bosser ? On dirait qu’il n’ont jamais été à l’école, pfui !

– Mais non, en fait ce sont de grands sadiques ! Ils en ont tellement bavé à votre place que maintenant qu’ils ont du pouvoir, ils en abusent, ils se vengent ! L’immuno, tu verras, c’est génial. Le chapitre 2, sur l’immunité adaptative, est un peu compliqué, mais une fois que tu auras compris le schéma bilan avec les trois voies, LB, LTCD4 et LTCD8, les détails passeront tout seuls. Je suis tombée sur ça au bac. Avec la génétique, c’était les deux chapitres que j’adorais. Les rouages du corps humain, c’est forcément plus passionnant que les cailloux !

– M’en parle pas, je suis en train de me faire des fiches pour réviser toute la géol. Mon dieu que c’est chiant !

– Je suis bien d’accord… Je ne sais pas pourquoi ils s’évertuent à vous faire bouffer du caillou alors que ça n’intéresse quasiment aucun élève de S. En ST2S, ils ne font que de la bio appliquée au corps humain, c’est juste captivant ! La digestion, le système cardiovasculaire, etc. Mais bon, ce n’est pas moi qui fais les programmes, alors il faut se plier à leurs desiderata, on n’a pas le choix. Allez, on attaque les primitives. Sors mes cours et le tableau des primitives. C’est très simple, c’est juste le contraire des dérivés. D’ailleurs tu vois, dans le tableau j’ai gardé le même sens que dans celui des dérivées. Du coup, au lieu de lire de la colonne de gauche à celle de droite, tu lis le tableau en sens inverse.

– Ah ok, c’est tout con en fait quand on a le tableau ?

– Pour celles du début, oui. Allez, on va en faire quelques-unes, très simples pour commencer. Tu vas voir que c’est enfantin. Par contre il faudra apprendre les formules et les mettre dans un programme au cas où ta mémoire te fasse défaut avec le stress en exam. Entre celles des dérivées et celles des primitives, ça fait un paquet de formules à retenir, tu n’es pas à l’abri d’une confusion. Pour l’instant, on fait avec le tableau sous le nez, la prochaine fois, on fermera les cours.

– Ça marche. »

Je lui sors un des mes innombrables exercices, rangés dans la multitude de classeurs que ma chère voiture a la gentillesse de transporter chaque jour sur une centaine de kilomètres. Xylam s’applique et trouve les premières primitives toute seule. Elle a compris le principe en un clin d’oeil… Il fallait juste partir du tout début, se raccrocher à ce qu’elle maîtrisait déjà, la rassurer, l’encourager. J’adore ces moments où l’élève voit les barrières tomber toutes seules, sans gros effort, et qu’il reprend confiance et foi en lui. Avec le temps, l’expérience, je parviens à lire simplement dans son langage corporel si l’élève a compris ou pas. Il se détend, va de nouveau de l’avant. Je dirais même qu’une lumière se rallume dans son regard. Ce n’est pas le scintillement du bonheur (il ne faudrait pas exagérer !), mais au moins celui d’un bien-être, du confort, le retour de la motivation et de l’envie de réussir. 

J’ai le temps de savourer mon thé au citron et au miel, avant qu’il ne refroidisse vraiment. Une fois que les primitives simples sont exécutées avec aisance et sans mon intervention, je reprends les commandes.

« Bon, finie la rigolade, passons aux choses sérieuses. Comme tu es en TS, on ne te demandera pas des primitives aussi simples au bac. Ce qu’on vient de faire, les ES le font aussi. Il faut bien que pour vous le niveau soit un peu plus corsé ! Je t’explique : le but est de faire apparaître la formule du tableau, même si ce n’est pas ce que te propose l’énoncé. Écris ta fonction. Voilà. Ça ressemble à quoi, grosso-modo ?

– Heu, je sais pas, à rien…

– Mais si, regarde bien, tu n’as pas trente-six solutions.

– « u’exp(u) » ?

– Eh oui ! C’est quoi « u » ?

– (5x² – 8x + 3) ?

– Yes ! Donc pour « u’ », il te faut quoi ?

– Du coup… : (10 x – 8).

– Ok, alors tu réécris ton « exp(u) », avec le bon « u’ » devant et tu laisses de la place…

– Quoi ? J’ai rien compris !

– Laisse deux carreaux, puis tu écris le bon « u’ », qui est ?

– (10x – 8) ?

– Exact. Puis tu écris ton « exp(u) ». Voilà, c’est ça. Dans ta fonction initiale, tu avais quoi devant « exp(u) » ?

– (- 5x + 4)

– Ok. Maintenant, il faut te débrouiller pour que ta nouvelle ligne soit égale à la première. Que rajoutes-tu devant (10x – 8) pour que ce soit égal à (- 5x + 4) ?

– Ben je sais pas…

– Si tu sais ! C’est niveau 5ème !!! Banane ! Comment passes-tu de 10 à – 5 ?

– Je divise par 2.

– Presque. Fais gaffe au signe.

– Ah oui, par – 2.

– Ok. Et diviser par – 2 revient à multiplier par…

– (- 1/2).

– Ben voilà ! Capito ! Tu rajoutes (- 1/2) devant ton (10x – 8) et ça fait bien (- 5x + 4). Tes deux lignes sont égales 🙂 !

– Ah ouai, c’est chaud quand même… J’y arriverai jamais toute seule.

– Evidemment que si, il faut juste que tu te souviennes de la technique. Tu dois faire apparaître ce dont tu as besoin et bidouiller ensuite pour compenser. C’est tout bête. »

2. Plus complexes, tu meurs !

Le cours suivant, nous révisons les complexes. Xylam a aimé ce chapitre depuis le début. L’idée qu’un carré puisse être négatif l’a amusée. Le nouveau vocabulaire ne l’a pas gênée : affixe, partie réelle, partie imaginaire, module, argument, conjugué, etc. Mais dans la semaine, en classe, ils ont fait de nouveaux exercices, vraiment de niveau bac.

« On a fait un machin où on cherchait des parties réelle et imaginaire dans Z’, avec un genre de fonction… Puis on tombait sur des équations de droite et de cercle. Dans d’autres exos, on calculait des modules et des vecteurs et il fallait trouver des médiatrices, encore des cercles, des demi-cercles, des droites, des demi droites… Alors autant j’aimais bien les complexes au début, autant là, je déteste grave !

– Mais non, arrête de psychoter. Fais voir ces exos. Vous avez juste fait les ensembles de points. C’est la partie la plus difficile du chapitre. Ton prof n’a pas dû te donner les méthodes dans ses cours. La plupart ne le font qu’en exercice. Pour vous faciliter la tâche, j’ai mis la plupart des ensembles de points que vous pouvez rencontrer sur la fiche de cours. Les deux plus courants sont la médiatrice et le cercle. On va déjà revoir ce que tu as fait sur ça.

– Ok… »

On a ensuite repris l’exercice le plus complexe (c’est le cas de le dire).

– On introduit une application : dis-toi que c’est juste une fonction, dont z est l’antécédent et z’ l’image. On te donne la formule. Ce qui est important, c’est de comprendre que tu dois mettre z sous sa forme algébrique en remplaçant a par x et b par y, soit z = x + iy. Comme ça, à la fin, tu tombes sur des équations que tu as vues en 1ère S, équation de droite et de cercle. Tu t’en souviens ?

– Heu, bof…

– Allez, on va d’abord revoir ça : équation cartésienne et réduite d’une droite.

– Ah oui, ça me dit un truc, maintenant. »

On reprend les bases, car il est important que les nouvelles connaissances et méthodes s’ancrent sur les anciennes. C’est ainsi que fonctionne l’encodage des souvenirs, d’après les dernières études très sérieuses sur le fonctionnement de la mémoire.

– Maintenant, les équations de cercle. Te souviens-tu comment on met sous forme canonique pour faire apparaître les coordonnées du centre et la valeur du rayon ?

– Alors là, tu parles chinois !

– Rhooo… Tu l’as sûrement fait. Rapidement sans doute. Je vais te le réexpliquer. Si tu ne sais plus faire ça, c’est normal que tu ne comprennes pas l’exercice de complexes. En maths, on se sert toujours de tout. Au cours des années, tu acquiers des outils, il ne faut pas les perdre en route. Car dans les classes de lycée, surtout en filière S, on te demande d’avoir à ta disposition tous ces outils et de t’en servir avec aisance, dégainant le bon en fonction du problème posé. C’est comme l’apprentissage d’une langue. Si tu oublies la conjugaison du passé, par exemple, ça va être difficile de converser aisément, surtout lorsque tu voudras faire le récit de certains évènements…

– Ouai, mais comment tu veux qu’on retienne tout ?

– Je vous ai fait des fiches de synthèse sur tous les chapitres, justement pour que vous ne vous perdiez pas dans les cours détaillés des profs (qui sont d’ailleurs de vrais cours, avec les démonstrations de toutes les formules énoncées). Moi, ce que je vous donne, ce sont des recettes de cuisine, mais il faut les relire si nécessaire et ne pas hésiter à rentrer dans la calculette ce que vous avez peur d’oublier.

– Faut bosser tout le temps, quoi ?, répondit Xylam avec une légère mou.

– Oh ! T’es en S ou en STMG ? Tu crois qu’on obtient le bac S comme ça, toi ! Dans une pochette surprise ! Non mais, arrête de rêver ! Oui, il faut bûcher. Et moins on a de mémoire, plus il faut bosser. C’est comme ça. Je fais mon maximum pour que tu ne galères pas à comprendre ce qu’on t’enseigne. Par contre, je ne peux pas mettre les choses dans ton cerveau à ta place. Il te faut un minimum de travail personnel ! »

Après avoir revu les cercles, nous passons enfin au fameux « gros exercice trop dur » qui devient en un rien de temps limpide comme de l’eau de source. Le cours a porté ses fruits, je jubile. Et Xylam, bien qu’aillant dû forcer pour revoir les différents points abordés, est heureuse aussi d’avoir enfin compris l’incompréhensible.

– Pour le prochain cours, tu peux m’amener tes fiches sur l’immuno, s’te plait ? On a fait que des TP, ça part dans tous les sens. Celles que tu m’avais amenées en génétique étaient trop top ! Tout le monde voulait me les piquer, parce qu’avec on comprend tout super facilement.

– T’as qu’à faire des photocopies et leur vendre ! Lol ! Je plaisante. Heureusement que ça sert un peu à quelque chose ce que je t’apporte. Vu le temps que ça me prend de faire des fiches synthétiques, colorées et ludiques, mais pour autant exactes et complètes ! »

3. Guerres intestines en terre Immuno.

Second cours avec Xylam, dans la même semaine. Au programme : immunologie. 

« Tu vas voir, l’immuno, c’est trop simple ! Il y a plein de nouveaux termes techniques, comme toujours en sciences. Mais, si tu comprends ce qui se cache derrière ces mots un peu barbares, tu verras que c’est easy. 

– Si tu le dis…

– Premier chapitre, la réaction inflammatoire. L’antigène, c’est le méchant : une bactérie ou un virus par exemple. Il rentre dans ton organisme, en franchissant ta peau ou une muqueuse (comme les poumons ou l’intestin). Sache que nous avons des cellules sentinelles, sortes d’agents de sécurité, dans tout le corps, qui patrouillent jour et nuit, à l’affût de l’arrivée d’un truand. Quand elles voient arriver l’antigène, comme elles ne peuvent pas se défendre toutes seules, elles donnent l’alerte. C’est comme le témoin d’un accident qui, avec son portable, appelle la police et les pompiers. A défaut de téléphone portable, les cellules sentinelles envoient des médiateurs chimiques (l’histamine entre autres).

– Trop drôle !

– Et là, hop, hop, hop ! arrivent les pompiers et les flics, c’est à dire les monocytes et granulocytes qui circulent dans le sang. Ils débarquent sur le lieu de l’effraction pour prendre en charge l’antigène en le phagocytant. Ça te parle, la phagocytose ?

– Ouai, vaguement. C’est quand les cellules mangent la bactérie et la détruisent ?

– Voilà, c’est ça. Les cellules qui en sont capables s’appellent des macrophages. « Macro » ça veut dire « gros » et « phage » ça signifie « manger ». Ce sont des cellules qui sont capables d’avaler de gros éléments, de l’échelle d’une cellule et pas seulement de celle d’une molécule. On verra ça en détails plus tard. Voilà déjà le résumé de la réaction inflammatoire. Pas compliqué ?

– Non, ça va. C’est easy, lol, t’as raison. En TP, on a vu les symptômes en « eur ».

– Super, vas-y, je t’écoute !

– Douleur, chaleur, rougeur, grosseur…

– Exact. Alors explique-moi maintenant les causes de ces symptômes. »

Après ces précisions, on fait le point sur ce qu’est un antigène.

« Par exemple, entre une bactérie commensale et un staphylocoque doré, lequel est considéré comme un antigène ? Haha ! Sais-tu déjà ce qu’est une bactérie commensale ?

– Non.

– Nous avons des millions de bactéries sur et en nous : un kilo juste dans les intestins !

– Sérieux ? Beurk, c’est degueu !

– Mais non, pas du tout. Ce sont de gentilles bactéries ! Elles nous aident à nous défendre, à bien digérer, etc. On vit en symbiose avec elles. Celles-là ne sont pas considérées comme des antigènes heureusement. Par contre, quand on prend des antibiotiques, on les détruit elles aussi, les pauvres, ce qui crée des déséquilibres de nos différentes flores, intestinales notamment.

– C’est pour ça qu’il faut manger des yaourts au bifidus après une gastro ?

– Oui, si tu veux, ou d’autres probiotiques. Le staphylocoque doré, lui, il craint. C’est une des pires maladies nosocomiales qui soit. 

– Une maladie quoi ?

– Ce sont celles que l’on peut attraper à l’hôpital. Le problème, c’est que ce germe a tellement muté, pour résister aux antibios qui font profusion dans les hôpitaux, qu’aucun ne parvient à le détruire. Quand tu l’attrapes, c’est en général pour un bon moment. Une vraie saloperie.

– Les bactéries mutent ?

– Oui, comme toute cellule capable de division. Et elles sont très malignes. On invente un nouvel antibio, hop ! elles mutent et n’y sont plus sensibles. Il faut en trouver un autre, etc. C’est la course à l’armement ! Que penses-tu des fraises, des pollens ? Antigènes ou pas ?

– Y pas mal de gens qui y sont allergiques…

– Voilà, je voulais arriver aux allergies. En fait, une allergie est un dérèglement du système immunitaire. Il considère comme méchant, ce qui est inoffensif. Cela peut aller jusqu’à l’oedème de Quincke et la mort ! Dans ce cas, les anti-inflammatoires sont bien utiles. On empêche le corps de faire n’importe quoi et de voir des fantômes qui n’existent pas ! Par contre, lorsque la réaction immunitaire est nécessaire, il vaut mieux laisser le corps se battre. Il est fait pour, il sait se défendre. La fièvre, par exemple, est un signe de grosse baston dans l’organisme. Si elle ne monte pas trop haut et qu’on laisse le corps au repos (dodo, diète), la fièvre est très efficace. Elle tombe quand le corps a gagné la partie. Donner des antipyrutiques dès 38°C, c’est une vraie connerie. 

– Je savais pas que le corps pouvait se défendre tout seul.

– Notre espèce n’existerait plus, sinon ! On n’avait pas d’antibios, d’anti-inflammatoires et tout cet arsenal pharmaceutique à la préhistoire, pas plus qu’au moyen-âge d’ailleurs !

– Pourtant, parfois, la réaction inflammatoire ne suffit pas, si ? Sinon on se soignerait jamais !

– Tu as raison, on verra au chapitre 2, la réaction adaptative spécifique. Quand les macrophages ont mangé le méchant antigène, ils restent quand même vigilants ! As-tu entendu parlé du CMH ? Les marqueurs membranaires de l’identité ? Et des CPA ?

– Je crois pas, non. Mais les CPA, oui.

– Nickel. Pour comprendre ce qu’est vraiment une CPA, il faut savoir ce qu’est ce fameux Complexe Majeur d’Histocompatibilité. Ça me permettra de finir avec la notion d’antigène. Nos cellules portent des marqueurs qui sont comme des empreintes digitales, elles sont propres à chaque individu et identiques pour toutes les cellules d’un même organisme.

– C’est cool !

– Oui, tu vas voir que c’est très utile. Parfois, nos cellules mutent et peuvent totalement se dérégler, proliférant alors sans limites : l’origine de certaines tumeurs. On a tous de cellules cancéreuses car, comme tu l’as vu l’an dernier en génétique, les mutations sont un phénomène fréquent, même sans présence d’agents mutagènes.

– Sérieux ? Ça craint. On peut tous avoir des cancers, alors ?

– Oui, en théorie, mais le corps est une machine bien faite. La mutation entraîne en général une modification des marqueurs du CMH. Donc la cellule, au lieu d’avoir une bonne tête, a soudain une mauvaise tête et est détectée, par délit de faciès, en quelque sorte ! Assimilée à un antigène, elle est vouée à destruction. On évite ainsi tous les jours le développement de nouveaux cancers…

– Mais y a des gens chez qui ça marche pas alors?

– Ce n’est pas si simple. Le nombre de mutations à l’origine des cancers peut être fortement augmenté par des agents mutagènes (UV, substances chimiques qu’on absorbe tous sans s’en rendre compte : pesticides et autres) ainsi que par certains virus. Ce dysfonctionnement génétique peut aussi avoir une part héréditaire : on parle d’oncogènes, ces gènes qui prédisposent aux cancers. Parfois, la réaction du système immunitaire n’est pas assez efficace pour pallier le mal.

– Le corps n’est pas si parfait que ça, du coup…

– Non, le corps n’est pas tout puissant. Sinon nous ne serions plus des humains, mais des dieux ! Et puis, il est souvent soumis à des facteurs qui l’affaiblissent. N’as-tu jamais remarqué que certaines personnes déclenchent des maladies après une grande fatigue, un gros stress ou le décès d’un proche ?

– Oui, c’est vrai. On tombe souvent malade quand on relâche la pression, en début de vacances… C’est trop nul d’ailleurs !

– C’est rageant, mais compréhensible. Le corps n’est pas insubmersible. Quand il lutte, il se fatigue. Il a alors besoin de récupérer. Dans le cas contraire, le système immunitaire peut s’affaiblir et laisser se développer des maladies exogènes (grippe, rhume…) ou endogènes (cancers). Dernière parenthèse : sais-tu pourquoi certaines personnes rejettent des greffes ? Et ce qui différencie un autogreffe d’une allogrefffe ?

– Non, je sais pas trop… 

– Bon, je t’aide. Une autogreffe, c’est quand on greffe des tissus de l’organisme lui-même. Exemple : un bout de peau des fesses pour le visage. Y-a-t-il rejet à ton avis ?

– Non, vu que c’est la même empreinte digitale, le CMbidule !

– Marqueur du CMH, yes ! Et si on greffe l’organe d’une autre personne ?

– Là, normalement, l’organisme doit le détruire.

– Exact. C’est pour cela que ces greffes sont associées à la prise de médicaments qu’on appelle immuno-dépresseurs : ils diminuent l’immunité. Comme ça, le risque de rejet des cellules étrangères par l’organisme est limité. Mais ça ne marche pas toujours. J’ai un ami dialysé qui s’est fait greffé un rein à trois reprises. A chaque fois : rejet…

– Wouah… C’est compliqué les greffes en fait. Et puis on risque d’attraper d’autres maladies en plus.

– Oui, c’est comme quand on a le VIH. 

– Le virus du sida ?

– Oui. Sais-tu à quelles cellules il s’attaque ?

– Aucune idée…

– Aux cellules principales de l’immunité adaptative, les LT4, qu’on verra après. Il met en miettes tous les acteurs de cette deuxième étape immunitaire : les sujets atteints attrapent n’importe quoi.

– Donc ils peuvent mourir, genre, de la grippe ?

– Oui. Tuberculose, gastro, mélanome (cancer de la peau)… Revenons aux CPA. Quand le macrophage a phagocyté un antigène, il doit quand même alerter les copains. Pour ce faire, sur son marqueur du CMH, il met une partie de l’antigène. C’est comme dans les westerns quand on affiche des panneaux « Wanted » pour chercher les criminels !

– Ah ouai ! C’est trop malin ! Et ça sert pour l’immunité spécifique aussi, non ?

– Oui. Pour faire bref, les LT (4 et 8) ont besoin de ces CPA pour se mettre en branle. Imagine : le corps est comme un grand château fort et les stocks de LB et LT sont des réserves d’armes, très variées. Des masques contre les attaques de gaz, des boucliers et côtes de maille contre des attaques à l’épée, des tenues anti-radioactivité contre les armes nucléaires, des gilets pare-balles contre les armes à feu, etc. La forteresse ne dispose que d’un petit stock de chaque, mais possède heureusement une imprimante 3D capable de dupliquer assez rapidement celles dont elle a besoin. La CPA va informer l’organisme de l’identité de son ennemi et ainsi déclencher une prolifération des systèmes de défense appropriés !

– En somme, on est fait pour la guerre ?

– La vie, depuis son origine, a mis en place une multitude de mécanismes pour résister à sa destruction. La planète Terre n’est pas le pays des bisounours ! Il arrive cependant que certains êtres vivants cohabitent en bonne harmonie, comme dans les symbioses qu’on a vu au début de l’année. 

– Oui, les lichens, mycorhizes, coraux… Et nos bactéries !

– Yes ! Mais de façon générale, la survie implique un combat quotidien. On ne va pas commencer à philocher ! Tu as saisi l’importance de notre immunité pour notre bonne santé ! »

4. Maître ADN, dans son bureau perché, détient l’universalité du langage…

En biologie, comme en maths, je me régale à trouver des anecdotes parlantes et pragmatiques qui permettent aux élèves de voir les sciences comme des matières moins austères et compliquées qu’ils ne se l’imaginent. L’humour, le lien avec leur quotidien, les parallèles avec des situations familières sont d’excellents moyens de rompre la glace et de faire pénétrer dans leur cerveau ce qui peine à y entrer !

Petit cours de génétique avec Yelda, une première S.

« Le chapitre transcription-traduction est le plus passionnant de l’année, crois-moi ! Quand je l’ai découvert au lycée, j’ai eu un véritable coup de foudre pour la biologie, qui ne m’a jamais quitté.

– C’est intéressant, mais super compliqué quand même. Déjà dans les premiers chapitres, on nous a parlé de chromosomes mono ou bichromatidiens, homologues ou pas, de gènes, d’allèles, d’hétérozygote et homozygote, d’ADN, de nucléotides, de centrosome, d’histones, de mutation par délétion, insertion, substitution. De génotype, phénotype…

– Mais maintenant, tu maîtrises ces bases, non ?

– Oui, grâce à tes fiches et tes lexiques. Ça m’a simplifié les choses. On n’a fait que des TP avec la prof et à chaque séance elle nous balance quinze mille feuilles avec je sais pas combien de documents ! Elle nous a tous perdus…

– Là, c’est moins compliqué, ne t’inquiète pas. Et toujours super intéressant ! Tu vas enfin comprendre à quoi servent les gènes. Dans ce chapitre, il y a deux étapes : la transcription, puis la traduction. Imagine que la cellule soit un grand chantier.

– Si tu veux…

– Ce serait comme une agglomération dans laquelle il faut sans cesse détruire et reconstruire de nouveaux bâtiments : des serres agricoles, des centres commerciaux, des usines énergétiques, etc. Si je poursuis le parallèle : une ville a son activité propre, avec ses besoins, ses productions, mais elle est aussi sans cesse en interaction avec toutes les autres villes du département (l’organe, en biologie), de la région (la fonction biologique), du pays (l’organisme) et les autres pays (les autres personnes !). Pour gérer ce gigantesque chantier, il faut un cerveau : un bureau avec un gros ordinateur central dans lequel se trouvent les plans de ce qu’il faut exécuter, le planning de réalisation, l’organisation de la main-d’oeuvre, etc. Ça, c’est le noyau de notre cellule, avec sa fameuse molécule d’ADN (il y en a 46 ou 92 chez nous, en fonction du nombre de chromatides des chromosomes, donc des phases de la mitose). Tu te souviens du chapitre 1 ?

– Oui : le cycle cellulaire, avec la mitose et l’interphase, la réplication de l’ADN, tout ça ? 

– Yes ! L’ADN comporte les plans des divers chantiers. Mais pour ne pas s’égarer ou s’abîmer, l’ADN ne doit pas sortir du noyau (de son bureau), et donc ne pas aller dans le cytoplasme (sur le chantier).

– Ok…

– Alors comment faire ? Les maîtres d’oeuvre ont quand même besoin des plans pour les suivre une fois sur le terrain !

– Ils ont pas d’ordis portables, lol ?

– Tu as tout compris ! Il font une copie sur un ordi portable qui va sortir de la cellule et qui s’appelle… ?

– L’ARN messager ? 

– Voilà ! Tu as suivi en cours, c’est cool. On verra sa spécificité plus tard. Pour que les acteurs de la cellule, certaines enzymes notamment, ne confondent pas ADN et ARN, l’ARN est légèrement différent de l’ADN.

– Le U au lieu du T ?

– Oui, entre autres. L’ARN messager est une copie d’un seul gène, qui commence par un codon d’initiation et se termine par un codon stop.

– Ah oui, ça on l’a vu.

– Un gène donne des ordres, disons, pour un bâtiment, ou une sorte de bâtiments. Ainsi a-t-on un même gène pour les maisons d’une même résidence ou d’un même lotissement. Un seul ARNm peut donner de nombreux polypeptides, puis protéines, identiques ou très proches. On verra la différence entre ARN pré-messager et messager tout-à-l’heure, ainsi que la notion d’épissage et d’épissage alternatif ou différentiel. Restons dans les grandes lignes du chapitre.

– Tout ça, j’ai pas trop compris. Les histoires d’introns, d’exons…

– Ne nous perdons pas dans les détails. Résume-moi, à ta façon, ce qu’est la transcription puis la traduction.

– Alors, la transcription c’est la copie de l’information génétique de l’ADN sur de l’ARN messager, gène par gène.

– Tout à fait.

– Et la traduction, c’est le passage de l’ARN à une protéine ou plusieurs protéines du même type.

– Exactement. Tu as des exemples de protéines à me donner ?

– Heu… Les enzymes ? Les muscles ? 

– C’est à peu près ça. Les protéines ont deux grands rôles dans l’organisme : la structure et le fonctionnement. Nous sommes constitués (pour ce qui est de la matière sèche) en grande partie de protéines (même s’il y a aussi pas mal de glucides, lipides et minéraux). La myoglobine, par exemple, est une des protéines des muscles, mais en réalité il y a des protides dans tous les organes. L’autre partie des protéines assure de nombreuses fonctions de l’organisme. Tu m’as parlé des enzymes, c’est exact, tu connais déjà les digestives. Il y en a de multiples autres qui assurent les innombrables réactions chimiques se déroulant en permanence partout dans notre corps. Les enzymes des acides nucléiques, ça te parle ?

– Les ADN et ARN polymérases ? 

– Bravo ! Il y aussi les hormones, qui sont des médiateurs entre différents organes. Et les protéines de transport, comme l’hémoglobine des globules rouges qui transportent l’oxygène. Sans oublier tous les récepteurs membranaires : l’an prochain, tu verras notamment les récepteurs PRR des cellules de la réaction inflammatoire et les anticorps membranaires de la réaction immunitaire adaptative. Sans oublier les protéines de transport trans-membranaires, canaux permettant le passage de molécules et d’ions d’un côté à l’autre de la membrane (plasmique ou autre). Si tu prends spé SVT en terminale, tu rencontreras les ATP-synthases pompes à protons.

– En fait, il y a des protéines partout.

– Tout à fait. Mais l’organisme n’en pas pas besoin en quantité égale tout le temps. Le sportif va par exemple avoir une forte demande en hémoglobine et en myoglobine. Pour la femme qui allaite ce seront les protéines pour le lait, comme la caséine. Il existe, au niveau des gènes, des systèmes d’activation et d’inhibition qui permettent à la cellule de fabriquer exactement ce dont elle, ou l’organe qui lui « passe commande », a besoin.

– Le corps est bluffant quand même !

– Je ne te le fais pas dire. Une mécanique complexe, impressionnante, mais fragile… 

5. Quand la tectonique des plaques vient secouer vos cuisines !

Une autre fois, avec Yelda, j’ai essayé de transformer la géologie en cours de cuisine !

« Je vais d’abord t’expliquer ce qu’est la convection. Dans le noyau et dans le manteau se trouvent de nombreux éléments radioactifs qui se désintègrent en permanence. Cela représente une énergie pharaonique ! Au début du 20ème siècle, les géologues n’étaient pas tous d’accord pour accepter le fait que cette énergie soit suffisante pour parvenir à mouvoir des roches à l’état solide. Le concept peut paraître hallucinant, c’est sûr ! On a du mal à imaginer que la roche puisse bouger. Mais quand on voit les plissements, dans les montagnes par exemple, on finit par y croire. Comment cette énergie parvient-t-elle à déplacer la matière dans le manteau ? C’est là qu’on en vient à la cuisine !

– Mort de rire !

– Imagine que tu prennes une casserole, contenant de la purée de pommes de terre qui s’est bien figée dans le frigo, et que tu la mettes sur une plaque de ta cuisinière. Que constates-tu ?

– Que ça chauffe ! Et que ça peut attacher !

– Non mais ok ! Mais que se passe-t-il au niveau de la matière, dans ta casserole ? C’est pareil si tu mets de l’eau ou de la soupe à chauffer.

– Ça fait des bulles ?

– Oui, mais avant ?

– Je sais pas, ça fume ?

– Au niveau de la matière !

– Aucune idée…

– Ça monte et ça descend, avant de rentrer en ébullition. Tu sais que ce qui est chaud a tendance à monter et ce qui est froid à descendre ?

– Vite fait…

– La purée qui est en bas se réchauffe, elle va donc entrer en mouvement et remonter. Du coup, la purée encore froide de la surface va descendre. C’est comme la création de vent lors d’un anticyclone : l’air chaud en se déplaçant provoque une dépression et donc un appel d’air froid. 

– Ah ouai ? Ok.

– Les roches font pareil : chargées d’énergie, donc réchauffées bien que toujours solides, elles montent dans le manteau, alors que celles de surface descendent. C’est ce qui fait les boucles de convection. Tu vois sur le dessin ?

– Oui oui, tout à fait.

– Pense à la purée, lol ! Ce sont ces mouvements circulaires qui tractent et déplacent les plaques, un peu comme quand tu prends un tapis roulant dans une gare. Voilà le moteur de la tectonique des plaques. Easy, non ?

– Very easy, yes ! Par contre, j’ai pas compris, dans la subduction, pourquoi c’est toujours la lithosphère océanique qui plonge dans le manteau et jamais la plaque continentale…

– Ce n’est pas évident, a priori. C’est une question de densité. Cette fois-ci, imagine du pudding anglais, bien gélatineux ! C’est le manteau.

– Ouep, if you want !

– Tu mets dessus, d’un côté une plaque de chocolat, de l’autre des boudoirs. La plaque de chocolat, c’est la lithosphère océanique, plutôt dense, lourde si tu préfères. Les boudoirs représentent la lithosphère continentale, plus légère, moins dense. Tous deux sont en moyenne moins denses que le manteau. Si tu les pousses l’un vers l’autre, que se passe-t-il ? On suppose que les boudoirs sont costaux et ne tombent pas en miettes ! Quelle garniture va passer en dessous de l’autre, à ton avis ?

– Le chocolat qui est plus lourd et compact ? 

– Exact, le chocolat passe sous le boudoir ! En plus, dans les zones de subduction, la lithosphère océanique s’est refroidie et devient aussi dense que le manteau. Elle plonge donc sans problème sous la plaque continentale.

– Excellente ton histoire de chocolat, de boudoir et de pudding ! J’ai tout compris ! Tu crois que je peux la ressortir en contrôle ? 

– Je ne crois pas, non ! C’est pour que tu comprennes le mécanisme, banane ! Tu as juste à remplacer mes ingrédients par de jolis mots bien savants et tu verras que tu feras un carton ! »

6. Neuroplasticité : et si la langue remplaçait les yeux !

Un dernier cours de SVT que les élèves de TS ne comprennent pas forcément bien, mais qui est passionnant au même titre que les précédents : celui de la plasticité cérébrale. Toujours avec ma chère Xylam.

« Au début du cours, on va vu que chaque zone motrice du cerveau correspondait à une partie du corps. Mais, je ne comprends pas trop comment ça peut changer.

– On vous apprend, en effet, la théorie de l’homonculus (de Wilder Penfield). Quand ton livre a été écrit, c’était peut-être encore d’actualité, mais aujourd’hui c’est fortement contesté. Tout comme est dépassée la notion de cerveau gauche et cerveau droit, pourtant largement exploitée dans le film « Lucy », il n’y a pas si longtemps. Même si on a en effet des aires communes, c’est-à-dire des fonctions localisées dans des zones proches, chaque cerveau est unique, car il se façonne depuis notre naissance en fonction de ce que nous vivons et apprenons. 

– C’est ça alors, la plasticité ? Comme si notre cerveau était en pâte à modeler dont on peut changer la forme en appuyant dessus ?

– C’est une très bonne image. Perso, j’aime bien celle du champ sauvage, petit à petit colonisé par des troupeaux d’herbivores. Imagine qu’à la naissance, ou même avant, on dispose d’un champ de neurones vierge. Quand une information passe une fois (quand tu fais un geste, vois une image, entends un son, lis un texte), c’est comme si un animal traversait le champ une fois. Les herbes se couchent, mais le lendemain, elles se relèvent. Pour que de vrais chemins, puis des routes parviennent à se maintenir dans ce champ, il faut que le troupeau passe de nombreuses fois, régulièrement dans le temps. C’est ainsi que se déroule l’apprentissage et la mémorisation.

– C’est dingue, je ne voyais pas ça du tout comme ça.

– Au moins c’est facile à comprendre. On doit refaire les mêmes gestes d’innombrables fois avant de les maîtriser : regarde un enfant qui apprend à marcher, un musicien ou un sportif qui doit s’entraîner chaque jour pour être au top. Au niveau scolaire, l’idéal pour bien mémoriser ses cours est de les revoir par différents biais, sollicitant différents sens : lire ses notes, écouter le prof ou des enregistrements audios, visualiser des schémas, réécrire l’essentiel, regarder des vidéos… Plus les supports touchent de sens différents, plus l’encodage dans la mémoire est efficace, car on utilise de multiples voies d’ancrage pour arriver au même but. 

– Tu sais, j’ai trouvé des supers vidéos sur Youtube qui expliquent les bases des différents chapitres de SVT de lycée. C’est simpliste, mais c’est pas mal pour avoir une vision animée du cours.

– Très bonne idée ! Il faudra que j’aille voir. Comme cela tu as encore une autre approche du sujet, plus vivante que n’importe quel cours sur papier. J’en parlerai à mes autres élèves, je suis sûre que ça les intéressera ! Merci pour ton aide. Qu’avez-vous fait exactement en TP sur ce chapitre ?

– La prof nous expliquait que si on regardait un pianiste au cours de son apprentissage, on pouvait voir, sur les IRMf, s’activer de nouvelles aires. Elle a parlé aussi de récupération après un AVC. Là, j’ai moins compris…

– Quand une personne est victime d’un AVC, elle peut perdre l’usage d’une partie du cerveau (par hémorragie ou nécrose). La rééducation permet de retrouver la fonction perdue en développant de nouvelles voies de circulation affectées à cette fonction, mais dans des secteurs différents du cerveau. C’est comme si on créait une déviation pour que la circulation puisse se poursuivre, quand une route est en travaux. D’ailleurs, on le voit très bien aussi en forêt, quand un arbre tombe sur un chemin balisé : très vite une nouvelle piste apparaît, contournant l’ancien tracé. Le vivant a des ressources incroyables !

– Donc en bougeant un membre paralysé par le cerveau, on peut recréer une zone motrice ailleurs dans le cortex et faire en sorte que le corps retrouve sa motricité initiale ?

– Exactement. Je vais te parler d’une fille que j’ai connue. Elle est née hémiplégique, donc paralysée sur tout le côté droit, du fait d’une défaillance cérébrale (et non d’une section de moelle épinière). Les médecins lui prédisaient une vie en fauteuil roulant. Sa mère a constamment sollicité ses deux membres droits quand elle était bébé. J’ai connu la gamine à quinze ans et si elle ne me l’avait pas dit, je n’aurais pas détecté son hémiplégie immédiatement ! Elle faisait du sport, marchait et courait en boitillant légèrement, était gauchère mais se servait beaucoup de sa main droite. Bref, sa mère avait réussi à recréer des connections efficaces entres des zones motrices opérationnelles de son cerveau et le côté droit de son corps… Génial, non ?

– Whaou !

– Connais-tu l’histoire du soldat qui voyait avec sa langue ?

– Quoi ? Ben non !

– Un soldat américain perd ses yeux au combat, en Irak je crois. Ses aires visuelles fonctionnent, mais plus ses yeux. Qu’ont-ils imaginé pour qu’il puisse voir de nouveau ? Ils ont installé une petite caméra sur ses lunettes : les signaux qu’elle enregistre sont envoyés dans un boîtier convertisseur. Une fois recodé, le message est transmis à une pipette qu’il se colle sur la langue. Tu vois, comme les e-fumeurs ! Eh bien, maintenant il revoit !

– Sérieux ? Mais comment ?

– Réfléchis… Où va le message reçu par la langue ?

– Vers l’aire de la langue, du goût par exemple ?

– Oui. Un message qui correspond à ce que la caméra enregistre à la hauteur de ses yeux arrive donc bien au cerveau. Que pourrait-il alors se passer ?

– No lo sé…

– Pense à mon histoire de chemins… 

– Il se créait un nouveau passage de l’info au niveau des neurones ?

– Oui : de nouvelles connections synaptiques. De où à où ?

– De l’aire de la langue à celle des yeux…? Non mais c’est impossible !

– Pourtant c’est ce qui s’est passé ! Au début, le chemin était fragile, le soldat ne distinguait que des formes, des silhouettes. Petit à petit, à force de l’utiliser, les connections se sont renforcées, multipliées, et maintenant il peut reconnaître les visages et se déplacer seul. C’est dingue non ?

– Complètement ! Le cerveau est trop énorme !

– C’est ça la plasticité cérébrale ! »

7. Cas extrêmes : le rebelle à l’épée, la Trans, Mademoiselle Addams, le surdoué.

Évidemment, tous les cours ne sont pas si idylliques, ce serait trop simple et je finirais par m’ennuyer. Il y a des cours avec des élèves en souffrance, d’autres avec des élèves en rébellion, ou encore à moitié autistes ou inadaptés…

A chaque fois, il faut que je fasse comme avec les chevaux. Me mettre à leur place, comprendre leur attitude, trouver une faille pour réveiller chez eux l’envie de travailler, d’apprendre, de coopérer. Les chevaux ne parlent pas, il faut décrypter leurs émotions au regard de leurs comportement et de leur langage corporel. Cela fait longtemps que j’ai appris à faire de même avec les élèves. Ce qu’ils me disent, c’est une chose. Ce qui importe, c’est leur comportement, les émotions qu’ils laissent passer…

Quelques exemples, juste pour voir la diversité de mes apprenants.

Le rebelle à l’épée

Un de mes élèves ne voulait pas faire des maths avec moi. C’est sa mère qui l’y forçait. Il était en seconde, l’âge le plus ingrat pour les garçons ! Quand j’arrive, il se cache sous sa couette.

« Je veux pas avoir cours, les maths c’est de la merde !

– Va te mettre à ton bureau, s’il te plaît, je ne travaille pas avec quelqu’un qui est dans son lit. »

Il est en pyjama et cherche l’affrontement. Au bout d’une dizaine de minutes, comme je ne cède pas, mais reste impassible, il finit par s’asseoir en maugréant. Régulièrement, il fait semblant de se lever d’un bon pour retourner à son lit. Je lui barre la route et reprends l’exercice où il s’est arrêté. Comme il n’arrive pas à me provoquer par les gestes, il essaie par la parole.

« J’aime pas les maths ! Je veux dormir !

– Il est 11 heures 30, imagine si je venais à 8 heures comme pour d’autres élèves que j’ai avant toi !

– Mais c’est pas juste, c’est le week-end, je veux pas travailler ! J’aime pas avoir cours avec vous.

– Ça m’est égal que tu m’aimes ou ne m’aimes pas. Je suis là pour que tu progresses en maths. Le reste, ça m’est égal. »

Là, il prend un air malin, supérieur et me sort la phrase qui tue :

« Mais, c’est pas que je vous aime pas, c’est juste que je vous méprise…

– Méprise-moi, si ça te fait plaisir, du moment que tu bosses ! »

Comme il voit, qu’encore une fois, il n’arrive pas à me mettre en colère et à me distraire de ma mission, son agressivité gravit un échelon. Il attrape le sabre posé au dessus du bureau et me menace :

« Je vais aller trancher la gorge de votre jument, ça sera bien fait !

– Mais oui, bien sûr. Pose ça tout de suite. On est en cours de maths, tu n’as pas à avoir ça dans les mains. Je vais finir par toucher quelques mots à tes parents…

– Ben, si vous voulez. Mon père n’est pas là et ma mère, la zombie, j’en ai rien à foutre de ce qu’elle peut me dire. De toute façon, je la domine, elle a peur de moi. »

Voilà l’ambiance de ces cours très particuliers… Un ado en totale rébellion. Un père qu’il vénère, mais qui est souvent absent, à l’étranger pour son travail. Une mère qui a lâché les rênes, qui ne lui met aucun cadre. Un gamin rondouillard quelques années auparavant, dont ses camarades se sont gentiment (ou cruellement) moqué… Un garçon qui aurait pu être adorable, mais qui, mal aimé, sans repère, ni autorité sécurisante, cherche en permanence la limite, provoquant le conflit, en faisant semblant de prendre le dessus. Il ne m’impressionnait pas, je sentais que ce n’était que du bleuf, cachant une grande souffrance intérieure… Mais le travail n’était pas franchement efficace ! Heureusement, notre collaboration (ou plutôt notre confrontation) hebdomadaire ne dura qu’un an. Ouf !

La trans

J’eus aussi une élève déscolarisée pour dépression (soi-disant). Une ado mal dans sa peau, mais qui suivait parfaitement bien les cours. Elle était sous traitement : anti-dépresseurs et anxiolytiques à forte dose, à tel point qu’on ne pouvait faire cours que l’après-midi, le matin elle était HS. Je ne savais pas trop ce qu’elle avait. Elle s’habillait de façon androgyne, mais bon, comme beaucoup de filles de son âge…

Après quelques mois d’arrêt des cours, la boîte qui me donnait ponctuellement des missions auprès d’enfants en arrêt maladie, m’envoya de nouveau chez elle. En classe de seconde, elle était déscolarisée cette fois-ci pour phobie scolaire… Je n’en sus pas plus.

En fait, elle avait changé de prénom et portait désormais celui d’un garçon. Ah !… Comme d’habitude, je ne fis aucun commentaire. Mon rôle est de donner des cours de maths, pour le reste je dois rester neutre, ouverte d’esprit, bienveillante et surtout ne pas juger la vie de mon élève… Elle m’expliqua qu’elle avait enfin changé d’identité, comme elle le souhaitait depuis des années. Soit. Mais des filles du lycée l’avaient reconnue et avaient dévoilé le pot aux roses. D’où la phobie scolaire. Ok. Comme elle voyait que j’étais à son écoute et ne la jugeais pas, elle se confia à moi, entre deux formules de maths.

« Depuis que je suis petite, je me sens garçon. Quand je devais aller aux toilettes publiques, sur une aire d’autoroute par exemple, j’allais toujours, sans réfléchir, dans celles des hommes !

– Tu as pu changer d’identité, c’est déjà un premier pas.

– Oui, je suis suivi(e) par plusieurs psychologues qui veulent être sûrs que c’est sérieux. Le plus dur, ça a été de le dire à mes parents.

– J’imagine… Il a dû te falloir un sacré courage.

– Le pire, c’est pour ma mère : elle se dit que je n’aurai jamais d’enfant. 

– Son point de vue est compréhensible. Mais tu as un frère, tu n’es pas son seul enfant. Le but, c’est que tu te sentes mieux, non ? C’est le désir de tout parent.

– Oui, mais elle n’arrive pas à l’accepter…

– Laisse-lui le temps… Ça doit être un gros choc pour elle. Qu’est-ce que tu envisages d’autre pour ton changement d’identité ?

– Je vais prendre des hormones, mais je dois attendre mes dix-huit ans et je me ferai enlever l’utérus. Pour l’instant, je me bande déjà les seins, je ne les supporte pas.

– Ah, d’accord… C’est quand même un sacré truc qui t’arrive. Tu es très forte d’avoir réussi à enfin faire ton coming-out.

– Pendant des années je n’y arrivais pas. L’an dernier, j’étais vraiment super mal. Heureusement, j’ai trouvé des sites de personnes comme moi. »

Elle me montra, en effet, des sites de trans, avec témoignages à l’appui. Un monde tout à fait inconnu pour moi. Un des mystères de l’être humain : avoir un cerveau d’un sexe différent de celui du corps. Ça existe et ce n’est vraiment pas facile à vivre…

Mademoiselle Addams

Autre élève, autre surprise… La mère m’avait prévenue qu’elle était timide. Mais je ne m’attendais pas à cet extrême ! Quand je rentre dans leur appartement, un petit studio plein de bibelots avec une ambiance gothique, la fille regarde par la fenêtre, ne répondant pas à mon « Bonjour ! ». Je renouvelle mon salut plus fort, pensant qu’elle ne m’avait pas entendue. Aucune réaction. Là, je me dis que c’est plus grave que je ne l’imaginais…

Sa mère lui demande de venir s’installer à la seule table de la pièce unique. Une énorme lampe essaie d’éclairer ce bureau improvisé. L’ampoule doit faire vingt watts à peine, on est dans la semi-pénombre. L’élève est habillée de noir, la peau blanche, les cheveux ébène. On dirait une fille de la famille Addams ! Elle ne me regarde toujours pas, préfère le mur… J’essaie d’ignorer ce comportement étrange.

« Qu’est-ce que vous avez fait dernièrement en maths ? »

Elle est en classe de quatrième. Aucune réponse.

« Je peux regarder dans ton cahier ? »

Aucune réaction. Je prends doucement son cahier. Le dernier chapitre concerne les équations du premier degré.

« As-tu compris les règles des équations ? »

Sans surprise, pas de réponse. La mère est partie dans le coin cuisine pour nous laisser tranquilles. Assez perplexe, mais pleine d’optimisme et de ressources, je prends une feuille et commence à lui expliquer les règles avec des exemples. Son regard suit le tracé de mon stylo sur la feuille. En mon for intérieur, je me sens étrangement très à l’aise. Je suis comme face à un animal craintif. A moi de capter son attention et de mériter sa confiance. Ma bienveillance doit se sentir, car l’élève se détend petit à petit. Comme je vais dans son sens, que je ne monte pas le ton, elle accepte de venir un peu vers moi. 

Après chaque exemple, je lui propose une nouvelle équation, comprenant la même difficulté que celle que je viens de lui montrer et je lui demande de la résoudre à son tour. Sans me regarder, le nez sur son cahier, le regard passant de ma feuille à la sienne, elle résout la première équation. Pour la seconde, pareil. Elle comprend mes explications et arrive à reproduire, sur un nouvel exemple, la règle énoncée et illustrée. Une première réussite !

Je corse évidemment l’exercice, lui montrant des équations dans lesquelles se combinent addition, soustraction, multiplication et division. Elle s’exécute après moi. Quand elle ne comprend pas, elle arrête d’écrire et attend que je lui réexplique… 

Voilà comment se déroulèrent les cours pendant les quelques mois de notre collaboration.

C’est une fille abandonnée toute petite par son père, élevée par sa mère. Elle a une intégration sociale difficile… Je ne suis pas psy pour savoir exactement d’où lui viennent ces comportements atypiques, voir autistiques… L’essentiel pour moi est que nous ayons trouvé un moyen de communication, même non verbale, et que nous ayons pu faire des maths ensemble !

Le surdoué

Un monsieur très dynamique et jovial m’appelle une dizaine de jours avant le bac, pour réviser le programme de SVT de TS avec son fils. 

Un peu étonnée qu’il s’y prenne si tard, je me dis qu’il doit s’agir d’un simple coup de pouce.

« Combien d’heures souhaitez-vous que nous prévoyons pour ces révisions ?

– Deux heures par jour toute la semaine avant le bac, si vous pouvez.

– Je vais faire au mieux, mais quel est son niveau exactement ?

– Zaby ne sait rien, il n’a rien suivi de l’année !

– Vraiment ? Vous savez que le bac va arriver très vite ! Vous vous y prenez un peu tard… Je vous promets de faire mon maximum, mais je ne peux pas réaliser des miracles !

– Ne vous inquiétez pas. Il a de grosses capacités, mais il a eu des problèmes cette année. Harcèlement de la part de ses camarades, qui s’est fini en baston. Il était leur bouc-émissaire. De fait, il est resté beaucoup à la maison ces derniers mois et commence tout juste à sortir de nouveau. Par contre ne lui en parlez pas, je ne vous ai rien dit.

– Vous pouvez compter sur ma discrétion, Monsieur. Par contre, ne pensez-vous pas que deux heures par jour cela fasse beaucoup. Il n’aura pas le temps d’assimiler ce qu’on va faire entre deux séances…

– Je ne me fais aucun souci pour ça. Vous pouvez envoyer ! Zaby est un enfant précoce, il a un QI de 150, il comprend et retient très vite. Le tout est de l’intéresser, ce que son professeur au lycée n’arrive pas à faire. Il s’ennuie en classe. »

Grosse pression donc pour moi, mais heureuse que le père m’informe ainsi de la situation. Lorsque je rencontre Zaby, il a l’air assez mal à l’aise face à l’inconnue que je suis pour lui, son regard est fuyant. 

« Y a-t-il des chapitres que tu veux que je te réexplique en priorité ?

– Tous, je sais rien.

– Mais que faisais-tu en cours de SVT ?

– C’était lundi matin à huit heures, je dormais ou je dessinais sur ma table. De toute façon, la prof était soporifique…

– Ok, alors on va se faire un planning, afin d’avoir le temps de tout voir. Il va falloir bombarder, car nous aurons au moins deux chapitres par heure à étudier. J’espère que ça ira… »

Alors ça, pour aller, ça va comme un avion supersonique ! Zaby comprend tout instantanément et retient aussi bien le vocabulaire que les mécanismes que je lui explique. On galope ! Au bout d’une heure d’explications, je passe aux QCM pour voir ce qu’il a retenu. Il ne tombe dans aucun piège et fait un « sans faute ». Ensuite, on essaie de faire une dissertation sur le thème étudié. Impossible de lui faire prendre un stylo pour qu’il rédige si ce n’est une problématique, un plan, une intro et un schéma bilan ! Il n’aime pas écrire et il est impossible de le forcer à quoi que ce soit ! Alors nous faisons la dissert à l’oral, lui griffonnant juste deux ou trois schémas qu’il mettrait dans sa ROC pour illustrer son développement. Pour finir, comme il reste quelques minutes, il me pose des colles ! Non pas pour m’embêter, au contraire, parce que le cours l’a tellement intéressé qu’il veut en savoir plus. Il trouve que ce qu’on lui apprend est vraiment léger et mérite un approfondissement !

Je vous jure que ce n’est pas évident de garder son aplomb devant un élève dont vous savez qu’il a un cerveau qui tourne plus vite que le vôtre, même si officiellement c’est vous le prof et que vous lui apprenez réellement des choses qui lui sont utiles !

Après ce premier contact, nouveau coup de fil de son père :

« Je vous remercie beaucoup pour votre cours. Vous êtes le premier professeur particulier avec lequel Zaby veut continuer. Il n’a voulu revoir aucun de ceux qui sont venus avant vous !

– Comment ça ?

– Le courant est bien passé avec vous, vous ne lui avez pas mis la pression. Il s’est vite senti à l’aise. C’est très important avec les enfants précoces comme lui. Au fond, c’est un gros bébé. Il a besoin qu’on ne s’occupe que de lui, que l’attention du prof lui soit entièrement consacrée. Il manque énormément de confiance en lui, étant donné son échec scolaire et ses relations désastreuses avec ses enseignants et camarades.

– Tant mieux si cela fonctionne avec moi ! Vous savez, j’ai l’habitude des élèves difficiles, je veux dire « particuliers ». Je m’adapte en conséquence. Mon but est qu’on puisse progresser et atteindre au mieux les buts recherchés. Je pense qu’on va effectivement arriver à revoir correctement le programme dans son intégralité, étant donné la facilité de compréhension et de mémorisation de Zaby. Vous aviez raison !

– Je le connais, mon fiston ! Merci de m’avoir fait confiance. Et continuez comme ça ! Si Zaby veut poursuivre les cours avec vous c’est qu’il sent que vous lui apportez vraiment les connaissances dont il a besoin. Il repère immédiatement les personnes compétentes. Parmi les profs particuliers, il y a tellement de rigolos qui maîtrisent à peine leur matière…

– C’est la moindre des choses de connaître le programme que l’on prétend enseigner, quand même ! Parvenir à le transmettre, c’est une autre histoire : toute la subtilité de la pédagogie… »

Zabi a eu 17 au bac en SVT et une belle mention… Contrairement à ce qu’on pense souvent, les surdoués ne sont pas nécessairement d’excellents élèves. Il s’agit en général d’enfants précoces, c’est-à-dire en avance au niveau cognitif, donc intellectuellement, mais en retard sur d’autres plans : affectif et relationnel notamment. Ils sont souvent mal adaptés au système scolaire et souffrent, plus qu’il ne profitent, de leur QI supérieur à la moyenne… Dans cette rencontre, plus que dans celle d’autres élèves précoces que j’eus l’occasion de croiser sur ma route d’enseignante, ce qui me marqua le plus, c’est à quel point le père connaissait et comprenait bien son fils, trouvant les solutions adaptées pour sa réussite. Un modèle de parent à mes yeux.

Compétences

Posté le

21 avril 2019

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